CES AMÉRICAINS SONT-ILS FOUS ? NYC VA INTRODUIRE UNE TAXE URBAINE À MANHATTAN.

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mots-clés : taxe urbaine, vélo, bus, site propre, espaces partagés, NY, Manhattan

Chers lecteurs,

Il est fréquent de voir circuler dans sur les réseaux sociaux l’adage qui voudrait que les européens sont les « idiots du village » par leur politique sur la mobilité. Nous avions déjà un peu débunké cette idée après la diffusion massive de la false Context news sur l’interdiction des voitures thermiques en 2035 par l’UE… alors qu’on voulait nous faire croire que notre petit impact européen était ridicule face aux ogres de la mobilité chinoise et américaine. Notre article, en deux parties, démontrait tout le contraire :

Néanmoins, il n’y a rien de plus fort qu’une idée non rationnelle. Il nous semblait donc intéressant de faire le point sur certaines politiques envers la mobilité automobile… aux USA, pays de la « voiture pour tous ». Nous avions déjà précisé que les voitures électriques se vendaient mieux là-bas qu’en Europe. Certes, on peut toujours opposer que le Middle West reste très « voiture thermique», mais ce serait oublier aussi que 80% de la population américaine vit sur les côtes Est et Ouest où les voitures électriques se vendent comme des petits pains.

Toutefois l’objet de notre analyse ne concerne pas ce sujet, mais bien plus les stratégies d’accessibilité des métropoles américaines. En effet, NYC a décidé de s’appuyer sur un projet de paiement urbain dans le BDC (Business District Center), un peu plus de la moitié de Manhattan, incluant toute la pointe de l’île et c’est ce que nous allons analyser aujourd’hui.

Pourquoi NYC décide de créer une taxe urbaine d’entrée ?

Il y a plusieurs raisons, la première est sanitaire. Nous en avons déjà parlé dans le cadre des superblocks de Barcelone 3 juin 2019) et aussi de Los Angeles ( 7 aout 2023): la santé des habitants. En effet, une étude universitaire trans continentale a démontré le bienfait sur les habitants (14 septembre 2023) et donc la réduction du coût auprès de la Sécurité sociale.

La seconde est liée aux nouvelles attentes de la population locale après le COVID : les réaménagements des voiries offrent souvent l’opportunité de renforcer la végétation en ville, relier des parcs urbains entre eux, etc. ( 367 jours après : prendre du recul pour mieux planifier les prochains risques de pandémie et les villes, 17 mars 2021).

Toutefois, ce type d’argument est souvent renvoyé d’un revers de la main par les opposants à la réduction de la voiture en centre-ville qui, selon eux, aurait un impact économique désastreux. Pourtant, aujourd’hui, l’argument que nous aimerions développer est purement économique. En effet, la ville de New York a mesuré et évalué le coût des embouteillages et de la congestion dans une ville qui, par ailleurs, voit 90% des « commuters », chez nous on parle des navetteurs, sont des piétons ! En d’autres termes, des personnes qui ne trouvent pas de places de parkings dans leur immeuble de bureaux ou lieu de travail et donc doivent se garer ailleurs et… marcher ou prendre les transports en commun pour arriver au pied de leur lieu de travail. Quelques chiffres pour comprendre :

  • La vitesse moyenne à l’intérieur de Manhattan est de 10 km/h de moyenne…elle a diminué de 23% depuis 2010 ;
  • Chaque personne engluée dans les embouteillages de manière régulière perd… 117h de sa vie chaque année, soit près de 5 jours, soit une semaine de travail !
  • Le coût de cette inactivité est de 20 milliards de dollars/an.

“It’s time for a city that moves faster, breathes easier, and works better. Congestion Pricing will dramatically reduce traffic in the Congestion Relief Zone, transforming the area from gridlocked to unlocked. Less traffic means cleaner air, safer streets, and better transit.”

Ces chiffres ont un seul objectif : démontrer que la transformation des centres-villes avec moins de pression automobile est bien évidemment un objectif d’apaisement et de revalorisation de l’espace public pour les usagers faibles, mais plus encore, une mesure économique.

L’entrée en vigueur de la taxe urbaine est décidée pour le 1er juin 2024 avec une période de transition de 2 mois. Les véhicules de tourisme seront facturés 15 $, les camions seront facturés entre 24 $ et 36 $ selon leur taille, et les motos seront facturées 7,50 $. Il existe certaines exemptions – et quelques mises en garde.

Bien évidemment, il y a eu des réticences. Toutefois, le vote du Conseil d’administration de la MTA (Metropolitan transport administration) de l’équivalent de la RATP à Paris ou des Tec en Wallonie a été quasiment unanime avec 11 voix pour contre 1.

On notera qu’en parallèle à cette nouvelle politique, de nombreuses voies, dont la célèbre Broadway Av. seront transformées pour créer des voies de vélo à double sens et des lignes de bus en site propre.

Finalement, que retenir de cet exemple new-yorkais ?

Juste après le Covid, nous expliquions que toutes les pandémies avaient eut un impact sur l’urbanisme des villes. Force est de constater aujourd’hui que les habitants veulent plus d’apaisement dans leurs villes :

il semblerait que les effets réels commencent à se mettre en place. C’est d’autant plus vrai que la ville de NY avait entamé un travail de réduction des voies automobiles au profit des modes doux ou des bus. Toutefois, le projet était précipité et l’administration new-yorkaise était revenue en arrière dès la fin de la pandémie. Aujourd’hui, la MTA revient avec des solutions mieux planifiées… avec l’assentiment des responsables politiques, mais aussi, et surtout, de la population.

Pour approfondir la question et le sujet : le site de la MTA sur cette nouvelle politique et où nous avons extrait quelques éléments pour illustrer notre article.

Bonne et belle journée à vous.

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Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, data Scientist. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart-buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.

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