Temps de lecture : 3 minutes
mots-clés : Mobility, EV, véhicule électrique, valeur, value, cost.
Chers lecteurs,
C’est le mois de la mobilité, donc parlons (encore) de mobilité… sans langue de bois.
Sans nul doute, on vous a déjà bassiné les oreilles par la nécessité que « votre prochaine voiture sera une voiture électrique ». Il faut bien avouer que tout concourt à cette issue. Toutefois, et j’en faisais partie, vous avez un doute sur la durabilité de la voiture électrique : manque de sources de chargements, sources d’énergies fossiles des centrales thermiques plus polluantes que les centrales nucléaires, etc. Aujourd’hui, nous allons mettre en exergue une problématique peut soulevée en Europe est plus explicite aux USA : le prix des voitures électriques. En effet, si nous sommes tous écologistes dans l’âme, la question de se pose également sur la capacité de chacun à accompagner cette transition et selon ses moyens.
L’évolution du marché en Belgique
Le Belge gagne en moyenne 18.768 € par an (chiffres 2018 Stabel, article du 26/10/2020) pour un revenu ajusté net[1] de 25.955€. Dans le même temps, le catalogue des voitures électriques est très large passant de la Zoe (Renault) à 23.900€ (les prix de référence sont toujours les prix de base, hors options) jusqu’à… l’infini, nous proposerons ici deux prix indicatifs : La tesla S apd de 91.000 € ou la dernière Audi E Tron coupé affiché au prix modique de 80.000€.
Ce qui nous intéresse ici est la comparaison de ces 3 véhicules avec le prix de son équivalent en essence : la Clio de chez Renault vaut 18.325 €, l’Audi A4 40 TFSI 204 ch 43.230 €, etc. La différence n’est pas négligeable et si la différence est plus importante avec les véhicules prémium, il faut relativiser l’intérêt des véhicules de ce type, surtout en leasing d’entreprise et autres flottes de véhicules-salaire. Par ailleurs, le marché de l’immatriculation en Belgique est composé essentiellement de véhicules de seconde main (65% en 2020, source Stabel, 2021). Il faut donc relativiser les chiffres d’immatriculations des véhicules neufs et d’occasion, les seconds étant plus nombreux et moins couteux. De ce fait, même si la Zoe est relativement abordable, elle n’existe pas sur le marché de l’occasion, d’autant que Renault préfère louer ce véhicule que de le vendre. Seuls les véhicules prémium se déclinent à la vente, mais… souvent en leasing.
Bref, toutes les voitures électriques coûtent plus cher que leurs sœurs thermiques qui restent toutes deux essentiellement inaccessibles pour une grande partie de la population, préférant des véhicules plus vieux, passant de 6 ans et demi pour la décennie 2000 à 9 ans aujourd’hui. Ce chiffre augmente encore à plus de 10 ans pour les propriétaires de leurs véhicules (source : le moniteur de l’automobile, Yeelen Möller, 28 octobre 2020). Le phénomène semble également s’emballer ces dernières années.
La voiture électrique c’est pour les riches ?

On peut en effet le penser, mais alors pourquoi tout le monde vous raconte que la voiture électrique, c’est moins cher ? En fait, le modèle économique de la voiture électrique est différent de celui de la voiture thermique.
Pour la première vous payez plus au départ, pour ensuite récupérer une partie de votre investissement par la réduction des taxes, la réduction des frais d’entretien, le carburant (mais pour ce dernier c’est à nuancer si vous chargez votre voiture dans les stations/super chargeurs.
Pour la seconde, vous répartissez les couts tout au long de son usage et vous pouvez également maitriser les dépenses selon vos revenus.
Il y a donc un paradigme fondamentalement différent dans ces deux approches et, en effet, il faut être plus riche pour investir plus au départ et gagner plus par la suite. Bref, tout le monde ne peut se le permettre et la tendance d’allongement de la durée de vie des véhicules en Belgique le démontre de manière significative.
Pour suivre…
Cette question est déjà fortement relevée dans les sujets de mobilité au pays de la voiture, les États-Unis alors que « cachée sous le tapis » chez nous. Il en découle des sujets de politiques de mobilité et, surtout, d’accessibilité des territoires, car, finalement, les habitants ruraux devraient-ils se contenter de trottinettes électriques pour aller travailler en ville, les véhicules thermiques étant bannis des centres-ville ? Ces mêmes habitants étant d’ores et déjà défavorisés pour télétravailler, par manque de bande passante ?
Dans un pays où toute la politique d’urbanisme depuis le début du 20e siècle a focalisé sur le maintient et le développement d’un urbanisme diffus, on doit se poser la question de solidarité des territoires ville-agglomération-campagne. Nous en discuterons lors de notre prochain article.
Merci de votre lecture et à bientôt.
Quelques lectures :
Eve Andrews, dois-je m’endetter pour acheter un véhicule électrique ?, Grist , 3 juin 2021
Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, Data Scientist. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.
[1] Le revenu ajusté net : Le revenu disponible net des ménages s’élève, en 2018, à 19 368 euros par an et par habitant en Wallonie. La majeure partie des revenus provient de la participation des ménages à l’activité économique. Il s’agit des revenus dits primaires qui s’élèvent en Wallonie à 22 934 euros par habitant et sont composés de la rémunération des salariés, des revenus immobiliers et mobiliers ainsi que du revenu mixte, qui est propre aux personnes indépendantes. Pour passer au revenu disponible qui est le revenu monétaire « poche » qui sera consacré aux dépenses de consommation ou à l’épargne, il faut déduire les cotisations sociales et les impôts courants et ajouter les prestations sociales ainsi que divers transferts. Au total, ces taxes et transferts réduisent donc le niveau de revenu en Wallonie. Toutefois, l’Etat (quel que soit le niveau de pouvoir) consacre une partie de ses recettes à des transferts sociaux en nature (principalement les dépenses en enseignement et en soins de santé) que la comptabilité nationale considère comme étant au bénéfice individuel des ménages. En tenant compte de ces transferts, on obtient un revenu disponible ajusté de 25 955 euros qui dépasse donc à nouveau les revenus primaires. ( Iweps, 2021)
5 commentaires