
Pas plus tard que ce 23 septembre, la première chaine francophone belge proposait un reportage sur les Tiny Houses, leurs économies, leurs développements et leurs contraintes. En effet, en Belgique, le concept des petites maisons alternatives, issues de la crise des Subprimes, ne peut être considéré que comme des caravanes ou secondes résidences. Il est impossible d’y vivre. Pourtant, ce concept a le vent en poupe comme d’ailleurs les logements de vacances atypiques, dans des cabanes dans les arbres ou encore d’autres types de logements qui, plus ils sont anomaux, plus les nuitées sont chères.
Mais finalement, est-ce un phénomène de mode ou plutôt une mouvance pérenne au travers des enjeux nouveaux urbains et technologies ?
Le mouvement a démarré avec le constat nécessaire de reloger l’ensemble des habitants en Amérique qui ont perdu leurs logements après la crise des surprimes. Une problématique qui émergea également en Espagne et d’autres pays essentiellement du sud. Le début s’est marqué par des propositions de bricolage de camionnette s’inspirant de la culture américaine de déplacement des logements en fonction de son lieu de travail. Une culture très peu présente en Europe. Certains concepteurs se sont ainsi approprié des idées spontanées pour les restructurer et les conceptualiser, voire intellectualiser. La Tiny House de ce début de 21e siècle était née ! l’idée d’autonomie pseudo durable a fait le reste. Complémentairement, la pauvreté galopante dans les grandes villes a amené quelques architectes comme James Furzer à réfléchir à des mini habitations pour SDF, comme la photo ci-dessous et située à Londres.

De ce retour à la caverne, du moins, à la cabane de notre enfance, quelles seraient les tendances plus profondes qui animeraient notre conscient ou inconscient, dans le développement pérenne de la cabane déconnectée en ville ou ailleurs ?
Il nous est donc proposé un concept plus développé : l’architecture parasite, s’inspirant essentiellement de la réflexion sur les tiers-lieux, des espaces urbains relégués et qui sont appropriés officiellement ou non par des collectifs ou de simples citoyens pour développer des activités pleines d’urbanité. L’architecture parasite est une reprise de ce concept par les architectes de l’occupation des espaces délaissés… avec plus ou moins de bonheur.
L’approche architecturale s’inspire du plug-in informatique comme un port USB sur un ordinateur et travers duquel, tout peut être approximativement connecté. Serait-ce si simple ? Non, car l’architecture est reliée à la ville (ou au territoire) d’une manière ou d’une autre : électricité, égouttages, gaz, connexion internet à haut débit. Tels des fils à la patte, l’architecture parasite doit choisir entre être déconnectée ou bien reliée à la ville. Mais alors, le terme choisi est-il bien nommé ? Un parasite est, par définition, un corps temporaire dont on essaie de se débarrasser. Or, ici, des projets comme Za Bor à Moscou qui devise « penser la ville, panser l’architecture » , certes densifie la ville, mais la fige aussi. On est très loin de la Tiny house qui bouge au gré des jobs disponibles.

Toutefois, les architectes de l’architecture parasite s’imaginent nous offrir un potentiel de mouvement grâce à la connexion continue, le net. Vraiment ? Certes, la 5G va être une révolution en soit et qui va transformer les usages en ville (pour rappel, la 5G transfèrera les données plus vite que votre connexion à la maison), mais ce n’est pas pour autant que l’Instant City d’Archigram prendra réalité aujourd’hui ou dans un avenir proche.
archigram instant city
Et ce qui frappe ce mouvement architectural, c’est son inspiration des architectures imaginées pour la science-fiction d’une part et le travail sur la conception paramétrique d’autre part. la conjonction de ces deux éléments nous engage déjà vers une voie où l’architecture multiforme, contextuelle et morphologique s’immisce dans la ville tout en la densifiant, la régénérant de l’intérieur.
Étonnamment, ce sont les villes déjà denses et dynamiques qui s’approprient ces concepts (San Francisco, NY, Paris, Londres) alors que la question devrait être posée pour les villes en friches du sillon industriel nord-ouest européen. Se pose alors la question pourquoi ?
Est-ce une frilosité contextuelle des architectes ? Est-ce un conservatisme des villes et administrations ? Est-ce un manque de vision politique ?
Peut-être un peu des 3. Toutefois, à bien y réfléchir, cette architecture temporaire est nécessaire et, probablement même un catalyseur puissant pour redéployer des lieux aujourd’hui perdus alors qu’encore pleins de vie voici 30 ans. Il est donc peut-être temps de changer les mentalités pour expérimenter le temporaire, l’instant pour, comme l’avaient imaginé les architectes du mouvement Archigram (dont Rogers, Foster, Piano …), développer des machines à redéveloppement urbain spontanés. Le pouvoir est aujourd’hui au citoyen, laissons-lui la chance de s’exprimer avec des architectes, des sociologues, des urbanistes et avec ou sans l’appui des pouvoirs politiques. La dynamique collective est bien plus forte que les subsides.
Pascal SIMOENS, Urban Planner & architect, Smartcities expert.
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