POURQUOI LE TRACING NUMÉRIQUE A POSE PROBLÈME AUX USA ET LES LEÇONS A EN TIRER EN EUROPE

Temps de lecture : 4 minutes
mots-clés : Covid-19, contact tracing, Apple, Google, GPS, Bluetooth, the USA

Chers lecteurs,

Il est souvent nécessaire de prendre du recul, tant au niveau temporel que territorial. Comme vous le savez si vous me lisez régulièrement, je suis un fervent défenseur du tracing par smartphone afin de combattre la pandémie (comment faire compliqué lorsqu’on peut faire simple et mieux? 27 juillet 2019). Toutefois, l’expérience belge n’est pas probante malgré un téléchargement de plus 2 millions de personnes, soit 1/3 des smartphones (le soir, 19 novembre 2020). Les raisons en sont diverses et ma propre expérience démontre, entre autres :

  • Des défaillances dans la gestion des bases de données et le croisement de celles-ci
  • Des failles majeures dans l’anonymat : malgré un protocole garantissant l’anonymat, dès que vous devez vous faire tester, vous êtes fiché.
  • Des problèmes techniques inhérents à la technologie utilisée : le Bluetooth.

Il n’en reste pas moins que ce système peut être efficace et protéger votre anonymat s’il était bien mis en place. Sur ce dernier point, se pose de plus en plus de questions au sein même de notre Société qui nous catalogue de plus en plus sous le couvert des raisons sanitaires (Coronavirus: l’Espagne tiendra un registre des personnes qui refusent le vaccin, RTL info, 29 décembre 2020).

Mais revenons-en à notre article partagé (Why Contact-Tracing Apps Haven’t Slowed Covid-19 in the US, Gregory Barber, Will Knight, Wired, 9 août 2020). Si cet article est ancien (plus de 8 mois aujourd’hui), il nous intéresse, car il permet de comparer les systèmes de gestion de la santé entre l’UE et les USA et en tirer quelques constats :

« La recherche des contacts repose sur des tests abondants, bon marché et rapides, de sorte que les personnes infectées et exposées peuvent être rapidement identifiées. La plupart des États-Unis n’ont pas cette capacité . Cela dépend également de la confiance du public dans le gouvernement et le système de santé, ainsi que d’un filet de sécurité sociale pour ceux qui sont forcés de s’absenter du travail ou qui ont besoin de services de garde lorsqu’ils sont en quarantaine. Tous ceux-ci sont également rares. »

Ce paragraphe résume assez bien la difficulté aux USA :

  • La santé est découpée en de nombreux espaces territoriaux : de l’état fédéral, les états fédérés ou encore les contés. Il apparait clairement que la découpe des responsabilités a été un facteur de désorganisation avec l’incapacité de mettre en place un système, certes initialement efficace, mais dont l’implémentation par des décisions différentes d’un État à l’autre ou d’un conté à l’autre a accentué les problèmes logistiques.
  • Les GAFA se sont engagé sur l’anonymat, mais ont laissé les états/contés se débrouiller. En conséquence, les vitesses d’exécutions des projets furent très aléatoires et disparates : impossible de croiser les données (anonyme) pour atteindre une masse critique.
  • L’ensemble de ces difficultés ont rabattu le tracing à un travail manuel… particulièrement perfectible, faute de moyens, formations, etc.

Qu’en est-il chez nous ? Je vous renvoie à mon article de juillet 2019 pour comprendre la mise ne place du système de traçage (Coronalert). Malgré d’adhésion de la population à l’utilisation de l’application, nombre de problèmes se sont avérés contreproductifs et de constater un véritable découragement des utilisateurs. En ce sens, et comme démontré également dans l’article, il ne suffit pas de lancer une application, il faut également que l’ensemble de la chaine de gestion des données soit parfaite. C’est la raison pour laquelle Apple et Google se sont réinvestis dans la mise en place de l’application alors qu’initialement, elles ne voulaient pas le faire.

Ensuite vient la question du morcèlement des compétences… cela ne vous rappelle rien ? La Belgique a 9 ministres de la santé pour 11 millions d’habitants. Les USA ont également morcelé les soins de santé entre le fédéral, les fédérés, les contés. Sans nul doute, ce constat au travers de deux pays très différents (sur papier) montre des failles dans la gouvernance lors d’une crise.

De cette analyse, non exhaustive, il est intéressant de relever les enjeux de demain : une meilleure organisation des décisions de santé et s’appuyer sur la technologie comme un système global et continu, non parcellaire. Gageons que ce travail sera fait sinon, les prochaines crises (c’est pour bientôt) révèleront encore d’autres failles sans pour autant avoir colmaté celles déjà existantes.

Merci de votre lecture.

Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, Data Curator. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.

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