
Temps de lecture : 6 minutes
mots-clés : management territorial, subsides, Kansas, USA, valorisation, investissements
Chers lecteurs,
Nous allons aujourd’hui vous présenter un article du site Strong Town (USA) qui est philosophiquement inscrit à droite, dans la lignée libertarienne modérée qui considère que tout est contractualisé, y compris la gestion de la ville dans son ensemble à défaut de ne pas tout privatiser. Un modèle financiarisé qui est singulier pour nous, Européens, mais existe dans les faits depuis de décennies sur le continent nord-américain.

Contexte
La situation étant posée, nous vous proposons la lecture de cet article, car il met en perspective quelques questions qui seraient judicieuses de se poser également chez nous dans le cadre des investissements parfois très lourds dans nos villes.
L’article présente le cas de la ville de Kansas City (Kansas) qui a investi massivement pour l’arrivée d’un campus privé de l’entreprise Cerner, holding financier (fonds de pension, etc.) spécialisé à l’échelle mondiale pour les transactions financières numériques et sécurisées (Flyware) comme dans la biogénétique. La capitale du Kansas, petite ville moyenne de 150.000 habitants (2019) éprouve les plus grandes difficultés à attirer des grands centres de décisions, outre l’ombre que lui fait sa grande sœur Kansas City du Missouri (480.000 habitants). La ville et l’État du Kansas a donc engagé des obligations pour financer la venue du groupe Cerner et à la clé l’espoir de 4.000 emplois directs et de nouvelles taxes sur la consommation, ce qu’on appelle les aménités indirectes. Sur papier, cette proposition aurait pu en faire rêver plus d’un, mais la pandémie et le retournement des usages de bureaux avec l’avènement généralisé du télétravail ont complètement transformé la situation au point que le holding a décidé de vendre son siège grâce aux nouvelles habitudes. Proximus fait de même à Bruxelles.
De cette situation découlent deux constats :
Premier constat
Les villes moyennes qui tentent de se positionner dans les rails des métropoles créatives sont excessivement fragiles. Elles ne peuvent offrir la même résistance à une crise (ici une pandémie) et donc ne peuvent se battre à armes égales. Or, à l’avenir les crises vont se répéter. Une démarche spécifique de développement de ces villes est nécessaire, moins basée sur des subsides d’implantations dans des zones économiques, mais plus par l’accrochage à des écosystèmes ancré dans le terroir.
Second constat
Cet article propose une analyse de la valorisation foncière et son adéquation avec les subsides fournis. L’entreprise Urban 3 offre un modèle SIG intéressant et rarement proposé chez nous, permettant de comparer la valeur d’un terrain en ville en fonction de sa « productivité », c’est-à-dire le nombre de personnes travaillant sur le territoire, calculé à l’hectare. Parallèlement à cette analyse, ils traduisent leurs chiffres en valeur ajoutée (taxes) par ha.


Constats et réflexion
Finalement cette manière de regarder le territoire comme un objet financier peut être très critiquée par les urbanistes et j’en fait partie. Toutefois, il faut reconnaitre que cette approche a le mérite d’analyser la manière dont « travaille » le territoire, de visualiser là où se trouvent les plus-values. L’adage veut qu’on ne prête qu’aux riches et dans le cas qui nous concerne, certains territoires sont plus riches que d’autres dans une même entité urbaine.
Et peut-être serait-il précieux d’analyser de temps à autres ce type de cartographie qui nous amènerait à ne pas investir des fonds publics dans des puits sans fonds ou d’accepter que les investissements consentis ne soient valorisés que pour la génération suivante.
Merci pour votre lecture attentive.
Lien vers l’article : Smart (and Not-So-Smart) Uses of Incentives, Strong Town, 10 août 2021.
lien vers les photos du Cerner Campus, Gould Evans, Architecte, Art Gray Photographe

Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, Data Scientist. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.
1 commentaire