
Temps de lecture : 4 minutes
mots-clés : Digital, hybride, physique, virtuel, expérience, résilience, Digital, hybrid, physical, virtual, experience, resilience, MTDU, ULB, UMONS
Chers lecteurs,
En cette période de reprise que j’espère toute douce pour vous, entre télétravail et présentiel, entre crainte de la xième vague et pseudoretour à la normale, voici un beau vent de fraicheur que vous offre quelques un.e.s de mes étudiants. Ceux-ci se sont appliqués à rédiger un article de blog sur base d’une thématique qui se limitait à la question d’une application ou un usage/comportement lié à la smart city dans le cadre, respectivement, de mon cours de villes intelligentes en Master à la faculté d’architecture et d’urbanisme de l’université de Mons ainsi que du master en management territorial et urbain, campus de Charleroi et en partenariat avec l’ULB.
Ces textes sont intégralement reproduits ici avec l’accord des étudiants, complété par un commentaire professoral en fin de texte.
Le deuxième texte est celui de Pierrick BOFFE traitant de la question du changement d’usages dans le commerce de détail au travers des nouvelles formes d’achats liées à l’e-commerce.
J’espère que votre lecture sera agréable.
Résumé (francais)
Le commerce de détail est en pleine mutation, évolution encore accélérée par la pandémie globale. Dans ce contexte, on assiste à un phénomène d’hybridation commerciale, où la digitalisation (l’e-commerce) qui fait du magasin un pôle serviciel multi connecté/multi canal coexiste avec une intrication de réseaux physiques d’implantation de commerces. Le magasin physique, en offrant une expérience unique au client, prolonge le digital et le digital enrichit le réel grâce à la collecte de données sur les envies et habitudes de consommation qu’il facilite.Toutes ces formes de commerce contribuent au seul but de répondre aux nouvelles attentes des clients en termes d’instantanéité, de souplesse et de confort d’achat. La numérisation du commerce est un défi autant qu’une opportunité pour le développement urbain. Les équipements et aménagements urbains doivent évoluer pour offrir une pluralité de fonctions complémentaires et pour s’adapter aux formats commerciaux émergents. Ainsi, les gares et arrêts de transport public peuvent devenir des espaces commerciaux grâce au digital. De même, il faut repenser les systèmes de fret urbain, mis à rude épreuve avec l’explosion du nombre de livraisons de colis résultant de l’e-commerce.
Résumé (anglais)
The transformation of the retail commerce is on going and even accelerated by the global Covid pandemic. We witness a change towards a hybrid model whereby the digitalisation (with the e commerce) leads to multi connection and multi channel, service oriented shops which coexist with several physical networks of stores. The physical shop, by offering a unique client experience, prolongs the digital one and reciprocally, the digital shop enrichs the physical one thanks to the data collection it allows about client’s wishes and consumer’s habits. All these forms of commerce have the same goal: meetings client’s expectations in terms of real time, flexibility and purchasing comfort. The e commerce is a challenge but also an opportunity for the city’s development. The equipments of the smart city should evolve to offer several complementary functions and to adapt to upcoming trade formats. Indeed, stations or public transport stops could become commercial spaces thanks to the digital transformation. In the same way, commercial transport of the city should be re-shaped to cope with the explosion of the number of deliveries of parcels resulting from the e shopping.
”Robot chariot Wiigo”, sur le site: robots-et-compagnie.com.
n.c, “Aperçut application IKEA Place”, sur le site: journaldugeek.com.
n.c, “Le premier “Amazon Lockers” déployé à la gare de Lyon – Amazon”, sur le site: fashionnetwork.com.
n.c, “Concept Van&Robots de Mercedes-Benz et Starship”, sur le site: emove360.com.
Introduction
Interpelé par l’article de Catherine Barba : «Le magasin n’est pas mort ! »[1], notre article se penchera sur le phénomène d’hybridation commerciale. Il comportera deux parties : d’abord, nous définirons l’hybridation commerciale et ses différentes formes et fonctions. Ensuite, nous analyserons ses effets sur les formes urbaines. Pour donner un cadre scientifique à cet article, nous nous baserons sur l’étude d’Arnaud Gasnier : « L’hybridation commerciale dans la smart city : comment adapter l’urbanisme à l’économie numérique ? »[2] et sur la note de synthèse du Brussels Studies Institute (BSI) : « Le commerce à Bruxelles : réconcilier l’urbain avec un secteur en reconfiguration »[3].
Phénomène d’hybridation commerciale
Selon Comeos, en 2018, l’e-commerce représenterait 12% du chiffre d’affaires du commerce de détail en Belgique. En 2019, près de 70% des consommateurs belges auraient utilisé le commerce en ligne. En 2020, le digital s’est imposé comme un levier de résilience pour le secteur du commerce face à la pandémie mondiale[4].
Selon le Journal Du Net (JDN), nous entrons dans l’ère du « Smart Phygital »[5] où les frontières entre les mondes physiques et virtuels n’ont jamais été aussi poreuses. La pratique commerciale hybride est en marche. L’objectif principal est d’offrir de nouvelles perspectives de consommation aux clients. Les magasins deviennent des lieux de rencontre et de découverte, où le consommateur vient vivre une réelle expérience. Le magasin devient un pôle serviciel et multiconnecté.
Le commerce est en mutation vers un modèle omnicanal. Le magasin physique prolonge le digital et le digital enrichit le réel. Par le digital, les données récoltées sur les consommateurs permettent de les faire venir en magasin grâce à des messages personnalisés et ciblés. L’analyse des données permet de corréler la lecture du catalogue digital et les visiteurs en point de vente. Il s’agit du « Drive-to-Store », concept primordial dans la mutation du retail. L’objectif est de susciter l’envie des consommateurs de venir en magasin.
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L’hybridation s’accompagne d’une évolution des habitudes des consommateurs. Il faut composer avec une clientèle plus exigeante et mieux informée. Avec le smartphone, les clients attendent des marques qu’elles soient accessibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. L’objectif premier est de répondre aux attentes des clients: instantanéité, souplesse des pratiques, livraison sur les itinéraires de déplacement ou à domicile.
Les nouvelles technologies comme la réalité virtuelle (VR), la robotisation ou l’intelligence artificielle (IA) sont parties liées avec le commerce. On fait le même constat pour les outils du quotidien comme les écrans, bornes, tablettes ou smartphones sur lesquels le magasin physique s’appuie pour se réinventer. L’e-commerce, présent dans toutes les étapes de consommation, tissera un lien intime avec les nouvelles formes commerciales physiques. Ce qui compte, c’est: l’expérience client, la réactivité, la pertinence et l’attention portée à celui-ci.
Effets de l’hybridation commerciale sur l’urbanisme
La numérisation est une source d’opportunités régénératrices de territoires, de la restructuration de la ville, de sa centralité et de son cadre de vie. Une adaptation de l’urbanisme aux nouveaux modes de fonctionnement de la smart-city s’impose.
L’hybridation va renouveler les formes urbaines du commerce via une refonctionalisation spatiale qui s’accompagne de la création de tiers lieux du commerce (co-working, consignes, expositions,…) induisant leur multi fonctionnalité. Tout peut devenir espace commercial : arrêts de transport public, mobilier urbain, gares,… grâce au digital. Le commerce développé en ces nouveaux lieux prouve que les noeuds de télécommunication s’associent à ceux du transport et que le multi canal superposé au multi modal renforce la centralité.
Le caractère éphémère des commerces ne cesse de grandir (pop-up store) et certaines boutiques mutent en showrooms ou espaces expérientiels. Il faut réfléchir aux modalités d’adaptation morphologique de la ville et travailler sur la capacité programmée d’un ouvrage neuf à changer facilement de destination fonctionnelle. Cette démarche requiert de penser l’aménagement urbain comme une pluralité de fonctions complémentaires.
Le commerce fonctionne dans une logique “omni canal” (en ligne et hors ligne). Il se développe également à partir de zones de stockage et de réseaux de livraison au-delà des surfaces de vente. L’augmentation des colis expédiés à domicile met l’efficacité et la durabilité des systèmes de fret urbain à rude épreuve. Suite à ce phénomène, on observe une redéfinition des bassins de chalandise à partir de flux dans l’espace qui se multiplie dans les interstices urbains, le long des grands axes, aux portes des agglomérations, dans les stations-service, gares ou lieux touristiques. La logistique devient partie intégrante du commerce et l’intensification des flux du dernier kilomètre commence à être intégrée dans les politiques locales.
Selon Arnaud Gasnier, l’hybridation renforce la centralité et la proximité redéfinies sur l’accessibilité multi canal. Sur les plans fonctionnel et commercial, le drive piéton, le web-to-store, le store-to-web, le Marketplace, le click and collect, la conciergerie, les points de retrait de colis accolés à un Espace de Logistique Urbain (ELU) deviendront les nouveaux équipements urbains de la ville de demain[1].
conclusion
Selon le BSI : « Le commerce de détail, ce n’est donc pas un déclin qu’il faut gérer, mais bien une reconfiguration sectorielle majeure qu’il faut accompagner » (Wayens,B, et al, 2020) . Cet article a esquissé les formes des futurs espaces commerciaux urbains. Le commerce continuera de remplir son rôle d’interface dans l’écosystème urbain, même si c’est au prix d’une adaptation génératrice de turbulences qui comporte de nombreux enjeux d’ordre économique, social, environnemental et urbanistique.
Commentaires
Le concept développé par Pierrick BOFFE correspond à une approche de Shoppertainment et mutiservicielle. Ces mutations bouleversent et perturbe les habitudes des commerçants, habitués à se préoccuper uniquement de la vente directe. Le concept est encore mal cerné par les pouvoirs publics qui ont très difficile à appréhender l’impact de l’e-commerce sur le commerce réel, proposant souvent des aides en parallèle au commerce réel alors qu’il faut surtout penser à la nécessité de faire les deux en même temps. Bref, s’il faut retenir une chose dans cette transformation, c’est bien que le commerce en général ne sera plus jamais comme avant et que les questions e-commerciale ne sont pas uniquement l’apanage des Amazon et autres Ali baba.
RéFéRENCES
Barba,C, 2013, Le magasin n’est pas mort, Paris, Fevad.
URL : journaldunet.com
Gasnier,A, 2019, « L’hybridation commerciale dans la smart city : comment adapter l’urbanisme à l’économie numérique ? », Riurba [en ligne], n°7.
URL : riurba.review/Revue/hybridation-commerciale-dans-la-smart-city-73/
Guillaud,H, 2013, 23 août, E-commerce et commerce : le temps de l’hybridation ?, Le Monde.
URL : lemonde.fr
Guinebault,M, 2016, 11 mars, Retail : ces concepts qui dessinent le commerce du futur, Fashion network.
URL : fashionnetwork.com
Languillon,R, 2019, 04 novembre, Le commerce et la ville : vers un changement radical des logiques d’aménagement ? Entretien avec Philippe Dugot, La Fabrique de la Cité.
URL : lafabriquedelacite.com
Moriset,B, 2005, « Entre utopie et pratique : la « ville numérique» comme projet urbain », [Logiques métropolitaines : modèles, acteurs et processus, IFRESI-CNRS, Lille 2-3 juin 2005], Laboratoire de Géographie, Lyon.
Patier,D, Alligier,L, Bossin,P, Perdrix,A, 2002, « Les conséquences du développement des nouvelles formes de commerce sur la logistique urbaine », [Rapport de recherche] LET, Ministère de l’Equipement des Transports et du Logement, Direction des Transports Terrestres, Sous direction des Transports routiers
URL : halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00112412
Patrice,A, Péron,R, 1994, « La fin des vitrines. Des temples de la consommation aux usines à vendre », Les annales de la recherche urbaine [en ligne], n°65, p.135.
URL : persee.fr/doc/aru_0180-930x_1994_num_65_1_1849_t1_0135_0000_4
Rallet,A, 2001, « Commerce éléctronique et loclisation urbaine des activités commerciales », Revue économique, Presses de Science Po[en ligne], Vol.52, p267-288.
URL : cairn.info/revue-economique-2001-7-page-267.htm
Rallet,A, 2001, « Commerce électronique ou électronisation du commerce ? », Réseaux, [en ligne]Lavoisier, n°106, p17-72.
URL : cairn.info/revue-reseaux1-2001-2-page-17.htm
Thym,B, 2018, 13 décembre, Le magasin physique est mort, vive le magasin physique, Journal du net.
URL : journaldunet.com
Trommenschlager,M, 2019, « Evolution du commerce et des formes urbaines à travers la transformation numérique », Architecture, aménagement de l’espace. Université Rennes 2. NNT : 2019REN20008.
Tsapi,V, Tchekwan,L, 2020, « Du commerce traditionnel au commerce en ligne : une modélisation théorique des déterminants du commerce électronique », Revue Internationale des Sciences de Gestion, Numéro 6/ Volume 3 : n°1, pp 572-592.
Vincent,M, 2017, 04 septembre, Le futur du commerce : Un concentré d’innovations, Forbes.
URL : forbes.fr
Wayens,B, Debroux,T, Godart,P, Mahieu,C, Strale,M, d’Ieteren,E, 04mai 2020, « Le commerce à Bruxelles : réconcilier l’urbain avec un secteur en reconfiguration », Burssels Studies [en ligne], Notes de synthèse, n°143. URL : journals.openedition.org/brussels/4311 DOI : doi.org/10.4000/brussels.4311.
[1] Gasnier,A, 2019, « L’hybridation commerciale dans la smart city : comment adapter l’urbanisme à l’économie numérique ? », Riurba [en ligne], n°7.
[1] Barba,C, 2013, Le magasin n’est pas mort, Paris, Fevad.
[2] Gasnier,A, 2019, « L’hybridation commerciale dans la smart city : comment adapter l’urbanisme à l’économie numérique ? », Riurba [en ligne], n°7.
[3] Wayens,B, Debroux,T, Godart,P, Mahieu,C, Strale,M, d’Ieteren,E, 04mai 2020, « Le commerce à Bruxelles : réconcilier l’urbain avec un secteur en reconfiguration », Burssels Studies [en ligne], Notes de synthèse, n°143.
[4] Wayens,B, Debroux,T, Godart,P, Mahieu,C, Strale,M, d’Ieteren,E, 04mai 2020, « Le commerce à Bruxelles : réconcilier l’urbain avec un secteur en reconfiguration », Burssels Studies [en ligne], Notes de synthèse, n°143.
[5] Thym,B, 2018, 13 décembre, Le magasin physique est mort, vive le magasin physique, Journal du net.