COMMENT EXPLIQUER POURQUOI LES CASSE-VITESSE ET LES CHICANES NE SERVENT A RIEN ?

Temps de lecture : 4 minutes + 6 minutes pour la vidéo
Mots clés : voiture, vitesse, sécurité, aménagements voiri
es, perspective, champ de vision

Dans mon métier, il est souvent question du « bon aménagement des lieux ». Nous allons ici nous arrêter quelques instants sur les aménagements des rues en ville et milieu d’agglomération en nous appuyant sur la vidéo de 6 minutes de Cheddar (USA).

L’intérêt est de comprendre comment les Américains ont voulu régler les problèmes de conflits entre les piétons et les automobilistes au tournant de la Seconde Guerre mondiale. Une approche ensuite appliquée en Europe et la Belgique ne furent pas en reste avec la bruxellisation, l’arrivée des viaducs et tunnels, etc. Mais souvent, on s’imagine que la raison est la vitesse. Certes, ce n’est pas faux, mais pas que, car la vitesse est intimement liée à une lecture de l’espace adéquat : l’angle de vision depuis la position du conducteur est essentiel sous la forme d’un cône partant vers l’infini et qui est d’autant plus long que la vitesse est élevée. C’est la raison pour laquelle les autoroutes ont été inventées, outre la connexion entre différents pôles urbains et à grande vitesse comme ce fut le cas de la première autoroute au monde en Allemagne et reliant Berlin au port de Hambourg.

Die Reich Autobahn, via Tumblr, German Engeneering

Il en découle un comportement humain naturellement confiant : plus on voit loin, plus on va vite. Heureusement, les enjeux des villes sont tout autres et la sécurité des piétons est fondamentale. Il en découle deux approches développées depuis que la voiture existe :

La première concerne la protection des occupants de la voiture avec une amélioration technique continue : freins, pneus, renforcement de la carrosserie, etc. elle d’ordre technologique.

La seconde concerne les aménagements urbains et c’est beaucoup plus compliqué. En effet, un chemin date souvent d’avant l’arrivée de la voiture et toutes les rues furent pensées pour rendre le chemin le plus courtes pour un piéton. La transformation de Paris par Hausman en est un exemple parmi d’autres. Seulement, voilà, la ville a vu arriver la voiture dans ces axes rectilignes et autres boulevards. C’est également sans compter le mode de pensées des aménageurs des trente glorieuses qui ont facilité l’émergence de lotissements machiniques à larges angles de vision grâce aux reculs des bâtiments.

Fatal Error… , le Tholonet, France

C’est au début des années 2000 que le basculement est apparu avec une volonté franche des responsables politiques de toutes les villes à apaiser la mobilité et offrir une plus grande place aux modes doux. Toutefois, nous (les aménageurs) n’allions pas transformer la morphologie urbaine : les grands boulevards sont toujours présents, les rues sont droites et les lotissements florissants. Est apparue de cette équation une multitude de systèmes : coussin berlinois, casse-vitesses, plateaux sur les carrefours, radars (pour les plus récalcitrants), … Si certaines propositions restent totalement pertinentes, force est de constater que qui le chiffre de réduction du nombre de piétons ou d’automobilistes morts sur les routes décroit, c’est plus lié à la qualité des technologies embarquées que des aménagements.

jouer avec la morphologie naturelle de la rue et la végétation. Seattle.

La raison est simple et je me bas depuis des années pour faire entendre raison aux pouvoirs locaux : il faut changer la morphologie urbaine avant de mettre des systèmes techniques qui sont toujours des emplâtres sur une jambe de bois ! C’est ce que propose également cette vidéo pour expliquer que selon les aménagements paysagers et urbains, le champ de vision du conducteur se réduit et donc il diminue instantanément sa vitesse. Une approche d’autant plus intelligente que les véhicules vont de plus apprendre à conduire seuls et que cet apprentissage fonctionne sur base des caméras, comme les yeux du conducteur. IL est donc important de renforcer les limites floues pour que les algorithmes des caméras traitent avec difficulté la définition de l’espace dans lequel se trouve la voiture. Précisons que l’arrivée du véhicule autonome sera peut-être une solution, car il imposera automatiquement la vitesse limite obligatoire : 30, 50, 70 ou 90 km/h. Mais ce n’est pas parce que la vitesse est bloquée à 30 km/h qu’il est judicieux de rouler à cette vitesse devant une école. IL faudra donc toujours avoir un aménagement adapté aux nouvelles technologies, c’est-à-dire, rendre complexe la définition des limites de l’espace environnant pour que la machine soit sur ses gardes. Et en attendant, ne trouvez-vous pas plus agréable l’image du lotissement arboré ?

Merci de votre lecture.

Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, Data Curator. Spécialiste Smart Cities et données urbaines, Université de Mons, Faculté d’architecture et d’urbanisme

Sources :

Transporation Psychologist (Facebook Page), une page FB spécialisée dans le recueil des ambiances urbaines routières aux USA

Best of 2019: Two Photos Reveal Why the Key to Slowing Traffic is Street Design, Not Speed Limits, Strong Twons

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