EST-CE QU’INTERDIRE L’AVION POUR LE TRAIN EST LA MEILLEURE SOLUTION EN EUROPE ?

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mots-clés : Europe, Eurostat, avions, trains, vols , courts, long-courriers

En bref : tout le monde s’imagine que les vols intraeuropéens sont inutiles et présentent un bilan carbone affreux. Et si on se trompait ? Au-delà, que faire ? Train ou avion ?

Chers lecteurs,

Pour entamer cette année, quoi de plus normal que de commencer avec un sujet environnemental ? En effet, il serait étonnant que ce sujet ne soit pas de nouveau le cœur de toutes les conversations courant de cette année. Et rappelons-le, le sujet n’est pas de savoir si le climat se réchauffe ou pas, mais bien de savoir comment nous allons développer notre résilience face à des changements climatiques rapides. Car personne ne peut le contester : les phénomènes extrêmes sont bien présents, le fameux « monde d’après » !

Pour démarrer l’année, nous allons, toutefois, prendre un chemin de traverse et je remercie Frédéric de Kemmeter, spécialiste du transport par rail (visitez Mediarail) qui a publié un sujet intéressant : moins de vols courts et plus de trains font-ils moins de GES ? en novembre 2024.

Hypothèse

L’idée populaire du moment sur les avions considère que les vols sont hyper polluants. Nous ne traiterons pas ici des types de polluants, mais plutôt de l’approche systémique du problème. Selon l’étude L’éléphant dans la salle : les services aériens long-courriers et le changement climatique[1], en anglais dans le texte et disponible en open source sur Science direct, qui est une des sources de références universitaires de qualité, nous apprenons que, si l’on considère tous les vols réguliers de passagers dans le monde, nos résultats confirment que les politiques axées sur les vols à très courte distance présenteraient des avantages climatiques très limités. Les vols de moins de 500 km représentent 26,7 % des vols, mais seulement 5,2 % du carburant brûlé, tandis que les vols de 4 000 km ou plus ne représentent que 5,1 % des vols, mais 39 % du carburant brûlé.

Paradoxalement, les institutions, comme les universités, suggèrent de plus en plus d’utiliser des transports alternatifs, comme bien sûr le train. Ce n’est pourtant pas si simple et c’est la méthode de calcul qui fait basculer l’avion vers l’opprobre ou l’inverse.

Analyse

source Eurostat, 2024

Dans l’article Remplacement des vols intraeuropéens à courte et moyenne distances par des vols intraeuropéens : impact sur les émissions de CO 2 et l’accessibilité régionale écrit par Niol Avagadro et al[2] (2021), on remarque que le remplacement des vols par le train aura un impact certain dans l’évolution du bilan carbone des pays, mais plus encore des individus où l’empreinte carbone est énorme dès qu’on prend un vol.

Toutefois, le sentiment de culpabilité que génère ce type d’analyse nous semble être contre-productif. En effet, si on pollue, alors continuons… telle pourrait être la logique dans un monde où en ne s’en sortira pas ! d’ailleurs, les chiffres d’Eurostat sur la croissance des passagers par aéroport (les données ICI) et qui nous démontre que les progressions les plus « sobres » sont tout de même de 7,8%, soit une croissance à faire rougir toutes les entreprises en croissance, pour atteindre 33.3% à Malte ! Dans le même temps, les plus grands hubs sont à Paris/Charles de Gaulle (67,4 mio, +17,3%) , Amsterdam (61,9 mio, +17,9%) et Madrid Barajas (60,1 mio, +20,4%).  Bref « ma petite entreprise se porte bien ». Mais est-ce grave docteur ?

Certains souligneront que les E-mazouts, également connus sous le nom de SAF (pour « carburants de substitution »), vont révolutionner le transport aérien. D’autres acteurs, comme Airbus, misent sur les avions à hydrogène et électricité d’ici 2035… pour les courts et moyens courriers. Or, le problème est les longs courriers. En d’autres termes, on tourne en rond.

ibid, 2024

Mais alors, que retenir ?

Rappelons que l‘impact global des transports aériens est négligeable face aux autres moyens de transport. Toutefois, celui-ci augmente … alors que les autres sont tendanciellement en retrait grâce à l’évolution des comportements ou les évolutions technologiques. C’est entre autres le cas des voitures. Des solutions semblent s’ébaucher pour les court-courriers intraeuropéens, mais le problème essentiel est lié aux longs courriers. Ces derniers sont probablement ceux qui offrent la plus grande plus-value économique aux échanges mondiaux : coopération au développement, échanges nord-sud, etc. Faut-il pour autant interdire à se déplacer en Afrique pour contribuer à leur développement ?

Finalement, ce qui reste à retenir c’est que la solution n’est pas technologique, mais bien sociologique ! en fin de compte, et dans un contexte de solutions complexes, le choix individuel à décider ou non de l’intérêt de partir en avion est le plus fondamental. Je me souviens, voici 2 ans, d’un voyage complexe regroupant 2 conférence et séminaires, l’un à Valence, l’autre à Montpellier. Finalement, j’ai opté pour une solution efficace, mais hybride : un vol pour l’aller et 3 trains pour le retour (Valence-Barcelone, Barcelone-Montpellier et Montpellier-Lille). Le problème reste toutefois le prix : 90€ vers Valence pour 200€ de Valence à Lille.

Houston, we’ve got a problem.

Bonne et belle journée à vous.

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Pascal SIMOENS Ph.D, Architecte et urbaniste, data Scientist. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart-buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.

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[1] Frédéric Dobruszkes, Giulio Mattioli, Enzo Gozzoli, The elephant in the room: Long-haul air services and climate change, Journal of Transport Geography, Volume 121, 2024, 104022, ISSN 0966-6923, https://doi.org/10.1016/j.jtrangeo.2024.104022.)

[2] Nicolò Avogadro, Mattia Cattaneo, Stefano Paleari, Renato Redondi,

Replacing short-medium haul intra-European flights with high-speed rail: Impact on CO2 emissions and regional accessibility, Transport Policy, Volume 114, 2021, Pages 25-39, ISSN 0967-070X, https://doi.org/10.1016/j.tranpol.2021.08.014.

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