
Temps de lecture : 10 minutes
mots-clés : hydrogène, Lorraine, Moselle, France, mines, tests, Wallonie
Chers lecteurs,
Voici 1 semaine, titraient les journaux la découverte d’un gisement naturel d’hydrogène en Lorraine, à quelques pas de la Belgique et avec une concentration hors norme (+ de 15%). Le renouveau d’une certaine souveraineté énergétique viendrait-il poindre le nez de l’Europe continentale dans un monde bouleversé depuis l’entrée en guerre de la Russie contre l’Ukraine ?
Mise en contexte
Comme vous le savez déjà, je travaille sur al question de l’Hydrogène depuis plus de 2 ans. Aujourd’hui, avec l’équipe d’ingénieurs de Poly-tech Engineering nous conseillons fréquemment des opérateurs privés et publics sur l’opportunité d’investissement d’un électrolyseur et pour lesquels John Cockrill est parmi les leaders mondiaux.
Rappel de notre dernier article sur l’hydrogène et la mobilité : La station d’hydrogène TOAGOSEI a été conçue comme une métaphore pour exprimer l’hydrogène (publié le 24 mai 2023)
Qualification de la production d’hydrogène

La production de l’hydrogène est devenue un arc-en-ciel de couleurs, selon les différents modes de production et rappelons que seul l’Hydrogène vert et blanc sont réellement durable. Les hydrogènes produits à base d’hydrocarbures sont plus polluants que le… diesel et l’essence ! (hydrogène ou électrique, ma voiture balance, publié le 18 novembre 2022).
Aujourd’hui des gisements potentiels près de chez vous

La Lorraine est un terreau de fer (et un peu de charbon). Aujourd’hui, c’est dans le département de la Moselle que la découverte du gisement de Folschviller a été faite, située à côté de Saint-Avold (entre Metz et Saarbrucken), dans le cadre du projet de recherche REGALOR (REssources GAzières de LORraines). Ce projet initialement travaillait sur les gaz de charbons, le grisou chez nous. On remarquera d’ailleurs que nous avons également ce type de recherches dans nos régions du bassin hennuyer et houiller. En effet, notre charbon était assez gras et plein de gaz. Le coal bed methane (CBM) est un gaz « neutre » d’un point de vue carbone. En effet, quoi qu’il arrive, il s’échappe de la terre et se disperse dans l’air…. Contribuant ainsi au gaz à effet de serre (GES). Paradoxalement, nous avons donc affaire à un gaz carboné, mais fatal, c’est-à-dire qui est naturel. C’est pour cette raison que les industriels tentent de le récupérer.
Ces études sont importantes, d’une part pour la souveraineté énergétique, mais aussi dans la transition des gaz fossiles à… autre chose (extrait du site) :
Les premières études de l’IFP Énergies Nouvelles avaient estimé en 2013, d’après les données de la Française de l’Énergie, que 370 milliards de m3 de gaz de charbon étaient enterrés sous nos pieds. Les travaux de recherche permettront d’affiner ce chiffre et de déterminer si cette ressource peut être valorisable. Une seconde étude a été menée par l’institut allemand pour la recherche sur l’énergie et l’environnement (IFEU). Le rapport de 2016 estimait que l’empreinte carbone du gaz de charbon était 10 fois inférieure à celle du gaz actuellement importé. C’est dans ce contexte que la région Lorraine a initié le projet Regalor, qui permettra d’arbitrer la faisabilité d’une exploitation de gaz de charbon, tant du point de vue scientifique, environnemental que social et territorial.
En Wallonie, des acteurs comme Total Énergies ne se sont pas trompés et investissent déjà dans ces recherches. Complémentairement, nous avons également des entreprises du nord de la France (Gazonor) qui investissent aussi dans ces gaz de charbon, entre autres à Anderlues (à quelques pas de Charleroi).

L’or blanc
Souvent, la recherche nous amène à trouver… autre chose que prévu ! Car même si la Lorraine, comme le Borinage, est aussi forte de ses sources géothermiques (vous allez comprendre pourquoi j’en parle), personne ne s’imaginait que l’hydrogène serait aussi présent dans ces veines et à plus de 1 000 mètres de profondeur. Les grands gisements d’hydrogène naturel dans le monde se trouvent principalement dans certaines régions géologiques spécifiques. Voici quelques-uns des gisements d’hydrogène naturel les plus connus :
- Gisements de gaz naturel : l’hydrogène naturel est souvent associé aux gisements de gaz naturel ou d’autres formes de gaz comme ce gaz de charbon. Certains des principaux pays producteurs de gaz naturel, tels que la Russie, les États-Unis, le Canada, l’Iran et l’Arabie saoudite, ont également la potentialité d’avoir des gisements d’hydrogène naturel.
- Serpentinisation des dorsales océaniques : Les dorsales océaniques, qui sont des zones de formation de nouvelles croûtes océaniques, sont connues pour générer de l’hydrogène naturel par un processus appelé serpentinisation. Des gisements d’hydrogène naturel associés à la serpentinisation ont été découverts au large des côtes de pays tels que l’Islande, les îles Canaries et le Costa Rica.
- Volcans et sources thermales : Certaines régions volcaniques et géothermiques peuvent également contenir des concentrations élevées d’hydrogène naturel. Par exemple, des gisements d’hydrogène naturel ont été trouvés dans des volcans tels que Kilauea à Hawaï et des sources thermales.
Ce qui fait la différence dans le cas qui nous préoccupe est ce que nous racontent les professeurs Philippe de Donato et Jacques Pironon, directeurs de recherche au CNRS. Laboratoire GéoRessources. Université de Lorraine :
C’était inattendu ! Personne dans la communauté de ceux qui travaillent sur le charbon ne s’attendait à trouver de l’hydrogène. A 600 mètres on a détecté 1% d’hydrogène, à 800 mètres on était à 6 % et à 1100 mètres on a vu la concentration d’hydrogène plus que doubler, on était à plus de 15%. Si c’est confirmé, ce serait le plus gros potentiel d’hydrogène naturel découvert à ce jour en France et en Europe.
Philippe de Donato et Jacques Pironon estiment que la concentration d’hydrogène naturel pourrait atteindre 98 % à 3000 mètres de profondeur. Le projet REGALOR qui devait s’achever en décembre 2023 sera prolongé. Dès février 2024, Il prendra une orientation exploration- exploitation. Le consortium Université de Lorraine, LFDE et Solexperts se donnent deux ans pour aboutir à une cartographie complète des ressources en hydrogène natif sur le territoire et la mise en place d’un système d’exploitation à l’échelle industrielle. (France 3 région, 24 mai 2023).
Alice n’est pas au pays des merveilles

Cette « trouvaille » doit encore être vérifiée et l’état français vient de libérer des fonds supplémentaires pour forer jusqu’à 3 000 m de profondeur et où les géologues espèrent trouver de l’hydrogène pur à 100%, ce qui reviendrait à trouver l’un des gisements les plus importants au monde.
En d’autres termes, il faudra encore attendre 10 ans minimum pour avoir une extraction de cet hydrogène. Par ailleurs, il reste cette question : pourquoi l’extraire si c’est pour consommer plus ? Toutefois, la question n’est plus alors de l’ordre scientifique, mais bien comportemental… et politique.
Bref…
…. En conclusion me vient un questionnement : le sous-sol lorrain et borain, n’auraient-ils pas quelques similitudes ? Mesdames et messieurs les géologues, merci de vos réponses en commentaires.
Bonne et belle journée à vous.
Merci pour le suivi de notre blog-à-idées ou à réflexions, c’est toujours agréable d’être lu et vous êtes de plus en plus nombreux (+ de 1 000 par mois en, moyenne). N’hésitez pas à commenter, c’est aussi une place de débats. Et surtout, merci de partager si vous soutenez nos réflexions ou recherches.

Pascal SIMOENS Architecte et urbaniste, data Scientist. Expert Smart Cities. J’ai commencé ma vie en construisant des villes en Lego, j’en ai fait mon métier. Geek invétéré, aujourd’hui je joins mes passions du numérique et de la ville au travers d’une expertise smart Cities et smart-buildings en travaillant en bureau d’étude (Poly-Tech Engineering) et j’enseigne cette même expertise à l’UMONS et l’ULB.
This post is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 International License.
