QUELLE QUALITÉ POUR QUELS QUARTIERS ?

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En tant qu’urbaniste et dans le cadre des aménagements d’espaces publics, je ne peux que constater une réticence grandissante des pouvoirs publics à oser aménager les espaces avec du mobilier, des matériels, de qualité, couteux et parfois beaux mais fragiles.

Si le coût n’est pas un objectif en soit, il faut également reconnaitre que la beauté et la qualité a un prix et, pour inconsciente soit-elle, la pensée dominante actuelle et de faire du solide, même si cela ai l’air moche ! Et encore, si cette approche était déclinée partout de la même manière, ce serait un problème des villes mais cela devient un problème social à partir du moment où la qualité des espaces publics et du mobilier urbain qui l’accompagnent est différent d’un quartier en difficulté par rapport à un quartier chic. La Belgique, fort heureusement est encore relativement préservée de cette démarche mais en France ou aux Etats-Unis, c’est devenu la règle.

Le récent interview de Malek BOUTIH (ancien président de SOS Racisme et ancien député de l’Essonne) sur l’émission de RUQUIER le samedi soir, On n’est pas Couché, en date du 19 mai, exprime cela avec une remarquable accuité.  En substance, il précise que les plans d’investissements massifs dans les banlieues française ne solutionneront rien… par le simple fait que de dire qu’il faut un plan spécial stigmatise déjà ces populations plus délaissées par la République que toutes autres. Mais ce qui nous intéresse ici c’est que son discours tient essentiellement dans le principe que la banlieue est un territoire comme un autre et un territoire comme un autre doit être traité de la même manière que tout autre territoire, même pour la conception des espaces publics.

En ce sens, le bureau Castro et Denissof, sur une opération comme Boulogne-sur-Mer nous intéresse et nous avons eu la chance, voici quelques années de la visiter. Leur intervention, dans le cadre d’un ANRU s’appuie sur la résidentialisation du site en y retrouvant une architecture dite « banale », On appelle aussi cela du « remodelage ». L’opération terminée en 2012 montre une forme d’apaisement typo morphologique entre un quartier de tours aménagé dans les années 1960-1970 et aujourd’hui, grâce à la création d’un bâti en continuité avec celui des habitants qui vivaient dans les quartiers adjacents, avant la construction du site du Chemin vert.  Mais le plus étonnant est la localisation du site : juché en haut de la ville, sur une falaise avec vue sur mer… jusqu’à l’Angleterre. Des terrains qui, à tout autre endroit sur terre, vaudraient une fortune. Et en cela, les problèmes des banlieues nous montrent que la question n’est pas la périphérie en tant que telle, comme si le rebus c’est d’être loin du centre, mais bien l’identité qu’est donné au quartier. Une identité dont la qualité ne peut être différente que celle offerte sur la place de la mairie ou de l’hôtel de ville.

Pour compléter la réflexion, le quartier est devenu l’unité de référence de la ville, vu l’extension de ses dimensions, sinon, comment se retrouver dans les mégapoles ? Comment (re)trouver une dimension humaine ? Mais si le quartier devient l’unité de référence de la ville, qu’en est-il de ses qualités ? Un article intéressant de Modelur (Design Cities Smarter) nous montre que le design d’un quartier améliore la qualité de vie et sanitaire dudit quartier. Cela signifierait donc que si un quartier est de bonne facture, traité avec des espaces publics de qualité et une architecture également tout aussi qualitative, et bien alors, les habitant seront en meilleure santé !

« Les chercheurs du Département de psychiatrie de l’UCSF ont comparé les taux de cortisol, l’hormone du stress, chez 338 enfants de familles à faible revenu. « Cortisol est une mesure de l’excitation biologique de stress, et des niveaux élevés peuvent mettre les enfants pauvres à risque pour la santé physique et mentale « , a expliqué le premier auteur de l’étude, Danielle Roubinov, PhD. » et de continuer sur la lancée en complétant par « Les chercheurs ont constaté que les enfants vivant dans des quartiers de bonne qualité présentaient des taux de cortisol plus bas et avaient moins de problèmes de santé que les enfants vivant dans des quartiers de mauvaise qualité. La qualité des quartiers a été déterminée par divers facteurs. Beaucoup de ces facteurs peuvent être influencés par une bonne planification et un bon urbanisme. Par exemple, l’accès aux espaces verts, l’exposition aux toxines environnementales, la disponibilité de centres d’éducation de la petite enfance et d’épiceries vendant de la nourriture saine. ». La notion de qualité semble donc un des critères importants pour la qualité de vie dans les quartiers. Nous en sommes malheureusement loin vu le peu de compétences développées dans les systèmes de décision des projets. Nous nous retrouvons plutôt dans une démarche où les projets deviennent le plus petit dénominateur commun de l’ensemble des acteurs de la ville, la qualité n’y a pas de droit de parole.

En tout état de cause, ce n’est pas une question d’argent, vu l’évolution des banlieues en France. Peut-être devrions-nous proposer la qualité, l’urbanité de ces quartiers pauvres ou en décrochage urbain ? aujourd’hui, l’idée vaut beaucoup plus que la matière…

plus d’infos : Good Urban Design Helps Children Live Healthier

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