
Voici donc un article des plus intéressants sur l’analyse de la rupture de charge en transports en communs et avec l’exemple concret de l’adaptation/réorganisation du réseau bruxellois en 2010.
Rédigé par un collectif[2] ULB (Université Libre de Bruxelles/IGEAT) et les facultés Saint Louis (Bxl/Economie), cet article définit tout d’abord les questions de ruptures de charges qui n’ont pas toujours le même aspect ni le même impact. Il n’est pas toujours question de la rupture entre deux modes de transports mais également du contexte dans lequel s’inscrivent cette rupture et l’accompagnement avec lequel elle peut être adoucie (par exemple une gare multimodale avec de nombreux services de qualité en attendant la correspondance).
Je vous convie donc à lire cet article ici (via Articulo/Journal of Urban Research/OpenEdition) si vous désirez mieux comprendre ces mécanismes.
Toutefois, à la lecture de cet article qui tente à démontrer que les changements d’organisation des réseaux de transports sont souvent plus contraignants, je reste perplexe sur un point qui rejoint la question de la structure urbaine et la projection mentale que les gens peuvent se faire de la ville. Ce point me tient particulièrement à cœur car la psychologie urbaine est un domaine qui ne me semble pas encore aujourd’hui suffisamment étudié alors qu’avec les questions des images multiples que la ville génère grâce aux nouveaux outils d’accompagnement numérique, cette question devient cruciale.
En effet, les réseaux de transports en communs sont des outils qui structurent la carte mentale de la ville pour les usagers et habitants. Ainsi, je reste intimement convaincu qu’il est parfois nécessaire de déplacer ou restructurer un réseau pour le rendre plus « symbiotique » avec l’échelle urbaine structurante de la ville.
L’exemple de Charleroi et son métro et sa ligne fantôme (ligne de Montignies-sur-Sambre, n°5) est significatif pour cette approche et à plus d’un titre.

Une ligne qui est appelée « fantôme » car construite dans les années 80 (1985) [3] mais jamais mise en service. Depuis 1991, chaque étude de faisabilité a démontré que cette ligne n’est pas rentable et réduirait le service à la population car accroissant les ruptures de charges avec le rabattement des lignes de bus vers la ligne de métro léger. En complément, la ligne traverse un territoire urbain typiquement industriel qui est caractérisé par une relativement faible densité (moins de 35 logements/ha) complété par des ruptures physiques atypiques telles que d’énormes intérieurs d’ilots et un chapelet de terrils infranchissables. Toutefois, la ligne traverse des quartiers industriels historiques, des cités sociales, un centre commercial régional, un centre de vie (cœur de la commune de Montignies), une école d’infirmiers.

Si nous analysons ce territoire d’un point de vue identitaire et à l’échelle de l’agglomération carolorégienne, nous ne pouvons que constater un espace de type no-man’s land au milieu de quelque part mais nulle part à la fois.
C’est à ce niveau que sont confronté deux logiques et approche différentes : d’une part les urbanistes de transports défendent qu’il faut distribuer les transports de telle manière à capter le plus de clients potentiels. Dans ces conditions, le bus est imbattable. D’autre part, les urbanistes de projet rêvent le métro comme une chance significative de reconnecter cet espace urbain au milieu de nulle part à la ville et son centre par un transport symboliquement structurant du territoire.
voir plus : vidéo TéléSambre sur l’infrastucture
[2] Frédéric DOBRUSZKES, Michel HUBERT, François LAPORTE, Caroline VEIDERS
[3] Complètement opérationnelle pour 4 stations et construction des infrastructures pour 3 autres stations, en ce compris ponts, tunnels et quais. Entre autre, la construction d’un tunnel sous un hypermarché de plus de 10.000 m² et sa galerie commerciale (Cora Chatelineau).