
Pour poursuivre dans la même lignée que le précédent (et hallucinant) Post relatif à un Mall déserté (ou presque) à Bangkok, un autre article relatif aux Mall désertés aux USA (un regard intérieur sur neuf centres commerciaux abandonnés, via BuzzFeed) et une petite mise au point qui me semble de bon aloi.

En effet, mon métier et surtout mon parcours professionnel m’a amené à travailler de près ou de loin sur plus de 6 Master plan de centres commerciaux en Belgique et en France. Cette expérience m’a surtout permis de comprendre les mécanismes de création, genèse, des projets.
Sans vouloir entrer dans des détails sans grand intérêt, il est plutôt important de comprendre les mécanismes commerciaux et leurs limites :
- Actuellement, on continue à construire de nouveaux centres commerciaux à travers toute l’Europe dont tout le monde dit que l’offre commerciale est saturée. Ces centres coûtent chers à construire mais offrent néanmoins un retour sur investissement considérable par rapport aux offres bancaires traditionnelles et est plus durable (obligations, SICAV immobilières) que la volatilité des actions. Donc, ce produit est encore un produit attractif dans le rapport investissement et retour sur investissent. Malgré la crise, des chiffres de rendement de plus de 8% sont régulièrement suggérés et avant la crise, on dépassait les 11%!
- La création de centres commerciaux est aujourd’hui réorientée vers les centres villes… en complémentarité avec la ville et non en dupliquant la ville. Cette approche qui est également maintenant mise en œuvre aux États-Unis est une révolution et dans cette révolution il y a des perdants : les centres commerciaux de périphérie.
- Un centre commercial est un produit et non un bâtiment. La durée de vie d’un centre commercial est d’à peine 15 ans ! au-delà, un plan global de rénovation est nécessaire sauf à accepter de perdre des marges et parts de marché face à la concurrence. En effet, les consommateurs que nous sommes se lassent très vite du contexte architectural dans lequel nous nous baladons le weekend.
Globalement, je considère que la fermeture d’un centre commercial est liée par ces 2 paramètres conjoints:
- Un manque d’investissement pour garantir le retour sur investissement à long terme.
- Une mutation des relations urbaines (retour en ville) conjugué à la fragilité d’un système monofonctionnel.
Il est important de comprendre que la conjonction de ces deux paramètres crée les conditions d’une mort annoncée. Prenons le cas du centre commercial des halles (Paris) avec la station de métro et de RER qui en fait l’une des plus importante gare d’Europe[1]. Le projet est situé au cœur de la ville Lumière… tout pour être parfaite au niveau de son attractivité depuis son ouverture fin des années 1970. Pourtant le centre commercial périclitait de jour en jour vu la vétusté de ses aménagements. Parallèlement à cela, d’autres centres commerciaux périurbains sont en mutation pour se raccrocher à la ville et investissent dans de nouvelles urbanités et adaptant l’offre à ces mutations. Il n’est pas étonnant de voir fleurir de plus en plus de services dans les Retails Parks, outre le développement de l’offre de transports en communs.
C’est donc bien l’addition des contraintes et non l’adaptation à l’une ou l’autre qui fait la résilience du projet sur le long terme.
La question de la création des nouveaux centres commerciaux n’est donc pas un problème en soit, la question est plutôt de savoir ce qu’on va faire des anciens sites qui, dans certains cas, sont devenus des éléments structurant du territoire sans le vouloir…

Enfin et en tant qu’architecte, ne perdons pas de vue (ou ayons l’humilité) de penser que l’architecture n’a jamais fait vendre un projet commercial. Certes, c’est un Branding en soi (cfr Média-cité, Liège), toutefois, les problèmes de rentabilité de K in Krotrijk ou encore du magnifique théâtre d’Anvers (Stadtfeestzaal) démontre qu’un centre commercial ne réussit pas avec un projet d’architecture de qualité. l’un n’empêche pas l’autre mais l’un n’est pas la condition de l’autre.
Après cela, bon shopping!

Plus d’infos sur cette problématique :
Death Mall Enthousiast (Facebook Page)
Abandoned Mall post Apocaliptic
[1] 750.000 passagers/jour, 120 trains/heure en heure de pointe. Source wiki